Lettre ouverte envoyée au directeur de la Traction
A l’attention de M. Nicolas LIGNER
Directeur de la Traction
Monsieur le Directeur,
Le sujet de l’aptitude physique, psychologique et professionnelle des agents de conduite est une préoccupation quotidienne pour les cheminots et pour notre Fédération, qui porte, depuis de nombreuses années, des revendications précises sur cette question.
Nous vous rappelons à ce titre que l’aptitude d’un agent de conduite lui est acquise pour un cycle défini et qu’il ne saurait être tenu de la remettre en cause prématurément, et qu’une anticipation de la remise en cause de l’aptitude peut avoir des répercussions sur la rémunération et les droits à la retraite, notamment par incidence sur les bonifications traction.
Pour la CGT, le sous-dimensionnement des centres d’aptitude n’est pas un motif acceptable de remise en cause du droit pour les agents de disposer librement de leurs certificats d’aptitude.
Concernant l’aptitude psychologique, les agents de conduite ne devront être tous titulaires de la licence qu’à compter du 1er juin 2018 et ce n’est qu’à cette date qu’ils seront tenus de justifier d’un certificat d’aptitude psychologique initial ou assimilé.
En outre, nous considérons que tous les agents de conduite habilités avant août 2003, sont titulaires d’un certificat initial d’aptitude psychologique valide, ce qui rend sans objet toute visite à cette fin, y compris pour les agents affectés aux trafics transfrontaliers.
Il réside sur ce point une divergence d’appréciation entre la direction de l’entreprise que vous représentez et notre Fédération.
Face à cette divergence, vous aviez pris l’engagement, à plusieurs reprises, au nom de la Direction de la Traction, qu’aucune pression ne serait exercée à l’encontre d’un agent de conduite refusant de se soumettre à une visite d’aptitude psychologique initiale ou à une remise en cause anticipée de son aptitude physique.
Or, plusieurs directeurs d’établissements ont adressé des courriers aux agents ayant opposé un refus motivé de se soumettre à une nouvelle visite d’aptitude psychologique initiale.
Ces courriers intitulés « bilan de confirmation psychologique », sont tous rédigés en des termes parfaitement identiques, ce qui nous laisse à penser qu’ils sont susceptibles d’émaner d’un dénominateur commun qu’est la Direction de la Traction.
Ainsi, sauf à ce que vous ayez vous-même renié votre engagement sans avoir cru bon devoir nous en aviser, il apparaît que certains de vos services n’aient cure de la parole donnée au nom de l’entreprise et s’autorisent des initiatives pour le moins critiquables et cavalières.
Il apparaît par ailleurs, qu’outre leur commune et « spontanée » inspiration, les directeurs des établissements en question partagent une maîtrise toute relative du sujet dont ils entendent traiter autoritairement, notamment du point de vue du nombre d’agents concernés.
Par ailleurs, la remise en cause unilatérale par certains directeurs d’établissements, de la prise en charge du coût de la licence, au motif que les cheminots ne cèderaient pas à leurs menaces, ne saurait perdurer à nos yeux sans voir se dégrader rapidement le dialogue sur le sujet.
Enfin, il est fait mention qu’une copie du courrier des DET serait « archivée dans le dossier de l’agent ». Cette mention interroge la finalité d’une telle conservation, son mode de conservation et l’accès des cheminots à ces données personnelles les concernant.
En revanche, le courrier « collectif » en question, n’apporte aucune réponse aux problématiques soulevées par notre Organisation Syndicale.
Rappelons tout d’abord que l’aptitude physique, psychologique et professionnelle des agents de conduite a toujours constitué un prérequis nécessaire à l’exercice et au maintien de leurs fonctions à la SNCF et que l’arrêté dit « d’aptitude » du 30 juillet 2003, n’a fait que constater cette situation préexistante.
Étant considéré que les certificats initiaux d’aptitude psychologique à l’exercice des fonctions de conducteur antérieurs à l’arrêté répondaient aux conditions nouvellement publiées, les agents de conduite ont conservé leur aptitude sans avoir à être soumis à de nouveaux examens suite à la publication de l’arrêté.
L’arrêté du 17 juillet 2015 portant modification de l’arrêté du 6 août 2010 relatif à la certification des conducteurs de train dispose en son article 20 que le dossier de demande de licence comporte notamment un certificat d’aptitude psychologique et que « une attestation d’aptitude psychologique délivrée conformément aux dispositions de l’arrêté du 30 juillet 2003 susvisé peut être fournie en lieu et place de ce certificat pour la délivrance d’une première licence ».
Selon l’article 13 du décret du 29 juin 2010, « tout conducteur de trains doit détenir une licence au plus tard à la date du 1er juin 2018. Les personnes habilitées, avant le 1er juin 2013, à la conduite de trains en application de l’article 6 du décret du 19 octobre 2006 susvisé, dans sa rédaction tant antérieure que postérieure au présent décret, sont réputées titulaires de l’attestation de réussite à l’examen portant sur les connaissances professionnelles générales et du certificat d’aptitude psychologique ».
Pour la CGT, ce qui était présumé conforme aux dispositions de l’arrêté de 2003 jusqu’au 16 juillet 2015, l’est tout autant au 26 juillet 2015 après entrée en vigueur de l’arrêté du 17 juillet 2015.
Il nous apparaît dès lors inutile d’imposer aux quelques 8000 agents de conduite dont le premier certificat est antérieur au 30 juillet 2003, une visite d’aptitude qui, outre le fait qu’elle entrave lourdement les moyens de production, constitue une source superfétatoire d’inquiétude.
C’est en ce sens que nous avons saisi le Secrétaire d’Etat aux transports par courrier du 13 juillet dernier, sans réponse de sa part depuis lors.
Or, vous conviendrez, Monsieur le Directeur, qu’il eût été aisé à Monsieur le Ministre, dans le cas où il eût souscrit à votre thèse, de nous en faire part de manière non-équivoque par réponse à notre adresse.
Dans l’attente d’une telle décision ministérielle, nous vous prions de vouloir bien, Monsieur le Directeur, rappeler vos services à vos propres engagements, et de faire cesser toute pression inutile et intolérable de surcroît, à l’encontre des agents qui, dans le simple exercice de leurs droits, s’opposent à la remise en cause de leur aptitude.
Restant à votre entière disposition pour tout échange complémentaire que vous jugeriez utile, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Directeur, mes salutations distinguées.
Olivier GENDRON, Secrétaire Fédéral
Thierry DURAND, Secrétaire du Collectif National Traction